« Reverser ce que l’histoire de France doit à ses ayants droit », tel est le programme que s’est fixé le metteur en scène Mohamed Rouahbi pour sa pièce Vive la France, présentée récemment au Théâtre Gérard Philippe de Saint-Denis. L’avis de trois ayants droit et l'interview de Mohamed Rouahbi.
Par Magali, Pierre et Sarah.
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Vidéo envoyée par prise-directe
Dans une obscurité juste troublée par le son d'une voix un homme dépose sur la scène un bouquet. Pendant plus de trois heures le théâtre Gérard Philippe de Saint-Denis devient un lieu de mémoire : celui des clandestins morts pendant la construction du Stade de France et qui n'ont pas eu droit à une sépulture décente, de ceux qui furent exhibés lors de l'exposition coloniale comme de vulgaires bêtes de foire à cause de leur couleur de peau, ou de ceux qui chaque jour s'entassent sous des tentes le long du périphérique... Mohamed Rouahbi met en scène des corps et des voix qui, à la lumière des archives, redonnent la parole à ceux que l'on a fait taire. Face à nous prennent forme plus de deux siècles de l'histoire de France et de ce qu'elle a nommé ses territoires. De la révolution française à la mort de Bouna Traoré et Zyed Benna dans un transformateur électrique à Clichy sous Bois, le passé défile dressant un constat plus qu'amer.
Inutile de chercher des concessions dans Vive la France. Mohamed Rouabhi et la troupe d'artistes qui l'entourent prennent à bras le corps leur sujet, nous y confrontent en faisant appel à tous les moyens possibles: chant et slam, vidéos et danses, lectures et photos. La musique omniprésente accompagne la succession des tableaux qui peut se révéler éprouvante, voire manichéenne tant certaines scènes semblent basées sur un dualisme opprimés/spoliateurs. Mais l'énergie déployée pour enfin redonner la parole à ceux qui ne l'ont pas eue est telle que l'on sort l'esprit alerte, abasourdi. Vive la France 1 et 2 nous réveillent à grands coups d'images fortes et de couleurs, traitant de notre quotidien, de nos origines ou de réalités que l'on préfère cantonner derrière le périphérique. Une douche froide qui, espérons-le, nous permettra de garder l'oeil ouvert.
Pierre
« Vive la France », le cri du cœur
Depuis sa création en octobre 2006, le spectacle du metteur en scène d’origine algérienne Mohamed Rouabhi suscite la polémique. Pavé dans la mare ? Suite de clichés sur l’immigration et les banlieues ? La pièce se veut évolutive, enrichie par l’actualité au fil des mois. Une trilogie est prévue et « Vive la France 2 » a été programmé en avant-première début mars au théâtre Gérard Philipe à Saint-Denis. Une rencontre intéressante : parler des banlieues dans un théâtre parisien aurait été moins légitime. Malgré tout, la salle était majoritairement parisienne. Les seuls dont on soit certain qu’ils venaient de Seine-Saint-Denis étaient les jeunes d’un groupe scolaire, plutôt agités.
Après s’être formé à l’école de la rue Blanche (Ecole Nationale Supérieure des Arts et Techniques du Théâtre), Mohamed Rouabhi a travaillé comme acteur, avant d’écrire ses propres pièces. Il a créé en 1991 avec Claire Lasne la compagnie « Les Acharnés » qui met en scène ses propres pièces dont « Malcom X », « Requiem opus 61 », et « Soigne ton droit ». Ses pièce sont jouées au Théâtre du Rond-Point, au Théâtre National de Luxembourg. « Vive la France » a été joué à Mantes-la-Jolie, Bobigny, Marne-la-Vallée, Meylan, Montreuil-sous-Bois, et Saint-Denis. Mohamed Rouahbi prépare actuellement une nouvelle création pour le théâtre du Rond-Point, à Paris cette fois-ci.
Magali
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