En 2007, les forces de l’ordre ont enregistré plus de 45 000 faits de violences sur des femmes par leur conjoint, note l'Observatoire national de la délinquance (OND) dans un bulletin paru en juillet. L’étude retrace également, pour ce type de violence, l'évolution des faits constatés, c’est-à-dire enregistrés statistiquement par les forces de l’ordre, au niveau départemental. Le plus souvent à la hausse. En tête, le département de la Seine-Saint-Denis avec 50,1 faits constatés de violences pour 10 000 femmes majeures. Soit une augmentation de 87,8 % depuis 2004.
Selon l'OND, les explications de cette spectaculaire hausse dans le 93 sont multiples. Tout comme au niveau national, "il est possible que, par un travail de sensibilisation aux questions relatives à la violence conjugale, les services de police et les unités de gendarmerie aient été conduits à repérer de façon de plus en plus exhaustive les faits de violences par conjoint". L'Observatoire émet une seconde hypothèse, valable elle aussi à l'échelon national et de la Seine-Saint-Denis. Cette hypothèse "se fonde sur l’évolution de la législation qui, en avril 2006, a élargi la notion de circonstances aggravantes de violences par conjoint ou concubin, aux ex-conjoints et ex-concubins ainsi qu’aux personnes liées par un pacte civil de solidarité".
Autre explication plus spécifique à la Seine-Saint-Denis : un contexte socio-économique difficile. L’OND relève en effet que ce département est aussi celui pour lequel le nombre total de faits constatés de violences volontaires sur personnes de 15 ans et plus atteint son maximum. Simone Bernier, présidente pour le 93 de l’association Femmes solidaires qui vient en aide aux femmes battues, rappelle également que la Seine-Saint-Denis est un département où il y a beaucoup de "chômage et de précarité [...] un facteur aggravant". "On est plus exposé", résume-t-elle.
L’OND relève enfin qu'"il [y] existe, comme semblent l’indiquer différentes campagnes médiatiques intervenues dans ce département depuis 2004, une politique de sensibilisation, d’accueil et de suivi des victimes de violences encore plus active qu’ailleurs, impliquant à la fois les administrations et les associations et qui aurait eu notamment pour conséquence une augmentation du taux de plainte". L’OND reste tout de même prudent sur cette hausse, soulignant qu’il s’agit bien de l’augmentation du nombre de faits constatés mais pas forcément de celle du nombre de victimes.
Simone Bernier, de l’association Femmes solidaires, fait le même constat que l’OND, en pointant un maillage associatif important. "On travaille en collaboration avec la justice, la police, les services, ce qui permet de mieux cibler ce type de violences", souligne-t-elle. Conséquence: "Les femmes osent davantage porter plainte dans le département", selon Mme Bernier.
Cette
volonté d’améliorer la situation dans le 93 se note également par
la création d'un Observatoire départemental des violences envers les
femmes depuis 2002 avec lequel l’association Femmes solidaires, tout
comme d'autres associations, travaille en étroite collaboration. Premier
de ce genre en France, cet observatoire, créé à l’initiative du
conseil général du 93, a pour vocation "de favoriser le travail en
commun de tous ses partenaires et de rendre visible le phénomène des
violences faites aux femmes afin de mieux les faire reculer". Un important
travail de partenariat est réalisé non seulement avec les associations
mais aussi avec des professionnels de la santé et de la petite enfance,
ainsi qu'avec les services de justice et de police.
C'est sans doute pour ses résultats positifs que l' Observatoire de Seine-Saint-Denis est régulièrement sollicité par d'autres départements, ces derniers souhaitant se doter du même dispositif. Si cette initiative permet de sensibiliser l'opinion publique sur les violences faites aux femmes, il reste maintenant à faire reculer de manière effective ce type de violence dans le département.
Najib Tsouria-Bélaïd
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