Un immense appel à tisser des liens. Voilà en substance l’idée proposée par Joëlle Bordet dans son livre "Oui à une société avec les jeunes des cités". La sociologue y parle des multiples difficultés auxquelles sont confrontées ces jeunes : la grande précarité régnant dans de nombreux quartiers populaires, les problèmes familiaux répercutés sur la scolarité des enfants, où une justice qui ne prépare en rien à la réinsertion de ceux qu’elle condamne. Mais son travail ne se contente pas de brosser un large portrait de la jeunesse en banlieue. Enrichie d’une longue expérience du terrain, elle esquisse aussi quelques solutions.
Ainsi, l’auteur nous donne l’exemple du travail qui a été mené entre des parents et des professionnels de l’ Education, dont des enseignants, dans une Ecole située à Caen. L’objectif était de mieux impliquer les parents dans la vie scolaire de leurs enfants et de construire leur place à côté de celles des enseignants. Concrètement, cela a consisté à faire assister les parents aux cours de leurs enfants. Après cela, les parents ont pu constater l’effet positif de l’opération sur l’éducation de leurs enfants, grâce à de nouveaux liens entretenus avec les professionnels de l’Ecole. Joëlle Bordet reconnaît tout de même que les familles trop éloignées de l’institution scolaire et marginalisées n’ont pu profiter de cette dynamique. C’est ainsi que l’auteur en vient à se demander comment impliquer tous les acteurs de la vie citoyenne dans de nouvelles dynamiques.
Dans son livre, la psychosociologue n’hésite pas non plus à nous faire voyager en dehors des frontières nationales pour proposer des solutions interpellant chacun. Elle nous parle de travaux menés aux Brésil sur le Théâtre Forum, où les habitants se mêlent aux scènes de vie courante jouées par des acteurs. Depuis, il a été importé en France. Bordet nous fait justement part de l’expérience qu’elle a vécu à Vaux en Velin en compagnie de Philomène, Maria, Anifa ou Djamila. Ces citoyennes devenues actrices pour l’occasion, se sont mises à rejouer des scènes de leur passé, parfois difficile. Résultat : elles ont renforcé leur "auto-estime de soi".
En construisant ces solidarités entre adultes et institutions, reste à savoir comment faire pour que cela bénéficie à tous ces jeunes qui restent fixés dans leurs quartiers ou tous ceux qui ne voient pas la loi comme une protection, mais avant tout comme un obstacle qui mérite d'être contourné. C'est pourtant ceux qui sont proche, voir déjà dans la rupture, qui ont le plus besoin de ce nouvel élan créateur de lien social.
Najib Tsouria Belaid
"Oui à une société avec les jeunes des cités!", Joëlle Bordet - éd. de l’Atelier, 2007 (207 p. ; 18 €)
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